Je suis ressortie du restaurant Bel Mundo avec le cœur qui palpite et une envie de sourire au monde entier. Vous savez, comme après avoir visionné un bon film qui vous (re)donne foi en l’humanité.
Il faisait pourtant gris, très gris et bien pisseux ce jour-là. Mais ma journée était faite. En marchant le long du canal, j’avais envie que Bruxelles attrape des bras et se matérialise devant moi. Je lui aurais fait un gros câlin en lui disant « tu vois, des gens bien sont là pour toi ».
Durable, abordable et adorable
Dès l’entrée, on sent quelque chose d’un peu différent. L’atmosphère est conviviale et le personnel est bienveillant. Derrière le projet de restaurant Bel Mundo, se trouve l’Atelier Groot Eiland. L’ASBL forme des chômeurs de longue durée défavorisés ou peu scolarisés, désireux de retrousser leurs manches pour s’intégrer et s’émanciper dans la société.
Des prix à tomber de sa chaise en palettes recyclées
Ici, c’est la motivation qui compte. Le service pourra avoir pour certains un petit côté empoté mais ce qui l’emporte, c’est la bonne volonté. On oublie donc vite la salade « au chèvre » remplacée par la salade « du chef » (au poulet!). Pâtes, soupes, menu du jour, poisson, … Après une petite leçon de néerlandais, chacun y trouvera son bonheur. Les plats changent quotidiennement sur le tableau noir, directement repérable dans ce décor boisé et lumineux.
C’est joyeux, délicieux et cerise sur la part de gâteau à 2 euros, les prix sont imbattables! Pour un généreux dhal de lentilles parfaitement assaisonné, comptez 7 euros 50, et ce montant est le même pour tous les plats…
Les invendus du Delhaize, transformés et magnifiés
Mais que les prix bas ne soient pas la seule chose qui vous pousse à entrer dans le grand bâtiment, voisin du MIMA. Le Bel Mundo pratique également une politique « zéro-waste » en partenariat avec les magasins Delhaize.
Chaque midi en semaine mais également le jeudi et le vendredi soir, les invendus des supermarchés sont transformés et magnifiés avant d’atterrir dans votre assiette. Votre repas sera durable, mais aussi local, car les cuisiniers ne se basent pas seulement sur des restes pour concocter leur menu.
Un terrain vague de 1.500 m² transformé en potager
Hors de la vue des clients se cache un petit coin de paradis que je rêvais de voir de mes propres yeux: un potager de 1.500 m² où sont plantés des légumes de saison et tout récemment, des arbres fruitiers.
C’est Bari, notre serveur ce jour-là, qui exhausse mon souhait. Plein de fierté, il capte mon enthousiasme et propose d’être mon guide à travers cette ancienne friche communale devenue le terrain de jeu des maraîchers, des cuisiniers… et de trois poules.
Il est loin, le terrain vague. Désormais, les locataires de logements sociaux face au jardin peuvent observer un paysage bien plus exaltant.
Après un espace délimité pour des arbres fruitiers fraîchement plantés, un chemin étroit est tracé. A notre gauche, les parcelles et à notre droite, le grand bâtiment industriel. Les occupants de l’hôtel Meininger profitent aussi du spectacle, puisque ce voisin du Bel Mundo possède quelques chambres avec vue. Mais Bari continue sa route. Il tient à me montrer une fenêtre grillagée un peu plus loin.
Atelier de menuiserie avec vue
En approchant, je découvre un atelier de menuiserie en entresol. Ici aussi des artisans en herbe en plein apprentissage s’activent. Et le résultat de leur travail peut être admiré dans le restaurant. Les tables, chaises, abat-jours et autres créations en bois qui embellissent le Bel Mundo sortent toutes de cet atelier !
Appelé par mon guide, un coordinateur de la menuiserie en sort via la fenêtre pour apparaître dans le potager. Alexander m’explique qu’ici aussi, comme en cuisine, on récupère et on transforme ! Chaque meuble est construit à partir de palettes et déchets de bois divers.
Le week-end, place aux brunchs et aux événements gastronomiques !
Le week-end, l’atelier est au repos… Mais dans le restaurant, on s’active jusqu’au dimanche, jour de brunch.
Chaque semaine à partir de 11 heures, c’est le Mary-Pop-In qui prend ses quartiers au Bel Mundo. Steven Desair, porteur de ce projet de restaurant Pop up de l’ASBL Eatmosphère, vogue de table en table entre deux coups d’éponge pour expliquer le sens de sa démarche. Partant du constat connu mais toujours aussi aberrant qu’un tiers de nos aliments finissent à la poubelle, Eatmosphère récolte chaque semaine 120 kilos de nourriture invendue toujours consommable. 100 kilos sont donnés à des organisations sociales et 20 autres se trouvent dans les plats qui défilent sur le buffet. Dans la liste des partenaires d’Eatmosphère on retrouve les biscuits Generous, le Belgomarkt, Färm ou encore Or Coffee et Brussels Beer Project. Que du beau monde !
« C’est chouette de voir comment un chef reconnu utilise sa créativité avec ce qu’on récupère »
« Nos événements sont une manière de montrer que tous ces aliments sont parfaitement frais », explique Steven, qui souhaite sensibiliser les citoyens via les brunchs mais aussi des « voyages gastronomiques ». Chaque second samedi du mois, un chef reconnu utilise lui aussi les invendus pour créer un menu 5 services. « Les restes varient beaucoup et les chefs sont toujours très contents de participer. C’est chouette de voir comment chacun utilise sa créativité pour utiliser ce qu’on récupère », se réjouit Steven.
Contrairement aux lunchs, les brunchs proposent uniquement des plats végétariens. L’occasion, encore une fois, de mesurer la diversité d’une cuisine sans viande autour d’un buffet à volonté à 18 euros.
J’ai été frappée par l’incroyable tranquillité qui régnait dans le restaurant. Asseyez-vous à table et profitez. Ici, on ne se jette pas sur le buffet dès son arrivée car de toute façon, les plats sortent à leur rythme de la cuisine.
Sur une table qui prolonge le bar, un grand gaillard barbu profite de ce calme pour faire une danse étrange. Avec la précaution d’un chimiste et la sensibilité d’un grand artiste, Geert manipule du thé d’exception avec attention. Pour Mist, la marque qu’il a créée avec sa compagne, il est parti à la découverte des plantations taïwanaises et a ramené de beaux souvenirs en Belgique. Chaque thé a son histoire, sa saveur. Laissez-le vous partager ses belles trouvailles.
De l’homme à la palette, en passant par le biscuit laissé de côté, tout le monde est transformé !
Au Bel Mundo, on s’émerveille donc sur du thé tout en mangeant des légumes du jardin et des invendus de grands magasins, assis sur des palettes en bois reconverties en chaises et accueillis par des serveurs, transformés eux aussi… Le Bel Mundo grouille de bonnes idées, des idées qui tiennent la route. Pourvu que le lieu attire de plus en plus de monde et un large public tout restant comme on l’a aimé: sincère et spontané.
Restaurant Bel Mundo
Ouvert du lundi au vendredi
Plus d’infos
Eatmosphère
Brunch chaque dimanche
Evénement gastronomique chaque second samedi soir du mois
Plus d’infos
Quai du Hainaut, 41/43
1080 Bruxelles
Retrouvez cette adresse et bien d’autres sur notre carte interactive de Bruxelles !
1 Comment
Superbe article et très bien écrit!