L’Harmonium, ce lieu à part où culture s’accorde avec confiture

Des lieux comme celui-là, il en existe trop peu à Bruxelles. Il y a deux ans, Charlotte et Florence ont inauguré l’Harmonium, un « comptoir culturel » dédié aux créations artistiques et à leur diffusion. Nous sommes parties à leur rencontre en journée, lorsqu’on se délecte de petits plats fait-maison en reluquant la longue liste des événements qui animeront l’espace une fois la nuit tombée.

En attendant la fin du coup de feu, on observe le décor. Des meubles chinés et des chaises d’écoliers customisées au sol, des dessins d’enfants punaisés à côté des œuvres l’artiste du mois au mur… Le regard vole d’un point à l’autre pour tenter de découvrir tous les détails de la pièce.

Le midi, l’Harmonium a tout d’une cantine de quartier adorable et accueillante, idéale pour déguster un délicieux lunch fait-maison. Si nos yeux font des bonds, notre nez lui, est pointé vers la cuisine pour guetter l’arrivée du plat du jour: des galettes de quinoa et carottes au curry accompagnées de salade.
L’Harmonium se vide petit à petit. Il est 14 heures 30 et Florence et Charlotte nous rejoignent autour de boissons chaudes et d’un gros cookie à partager.

« Qu’est-ce que je voudrais faire si je n’avais pas de barrière? »

Qui aurait cru, il y a trois ans que le duo travaillerait côte à côte ici à Uccle? Certainement pas elles. Chacune dans leur coin, sans se connaître, elles rêvaient à un projet similaire. « Charlotte faisait un boulot plutôt administratif dans le droit d’auteur. Moi, je faisais du recrutement », se souvient Florence, peu nostalgique de cette période. « J’avais envie de faire quelque chose de plus créatif, alors je me suis demandée ‘qu’est-ce que je voudrais faire si je n’avais pas de barrière?’ L’idée de bar est venue. J’ai commencé à réfléchir seule au business plan, à des recettes, des idées. »
Pendant ce temps, l’esprit de Charlotte s’agitait lui-aussi. Au courant des projets de chacune, une amie en commun à conseillé à Florence de rencontrer Charlotte. « On s’était croisées, mais on n’était pas copines! », raconte Florence en souriant. Difficile pour elle de se lancer dans une telle aventure avec une demi-inconnue, avec qui elle devrait certainement faire des compromis et des sacrifices. Mais la réalité l’a rattrapée. « Plus je travaillais sur mon projet, plus je me rendais compte que toute seule, c’était vraiment énorme ». 

« Entre Charlotte et moi, ça a tout de suite marché! »

Florence a donc fait le pas. Un petit message envoyé et les deux futures associées se sont rencontrées.  « Ça a tout de suite matché! », lance Florence, qui pourrait désormais être le porte-voix d’un Tinder pour entrepreneurs!

« On a mis plus d’un an à trouver un local. Cette période de transition nous a permis d’apprendre à nous connaitre, d’apprendre à bosser ensemble. On a de la chance de bien s’entendre! Bien-sûr, c’est comme un couple, il y a aussi des périodes de crises, des moments de stress. Je crois que dès le début, il faut se dire les choses plutôt que de garder de la rancœur et de la frustration… Je n’ai jamais eu de relation de couple aussi longue que deux ans donc ça y est, je suis prête! », conclu Florence avec humour.
« Dès le début, les événements faisaient partie du cœur du projet »

Finalement, Charlotte et Florence ont fait peu de compromis. « Dès le début et pour chacune, les événements faisaient partie du cœur du projet. » Si Florence a plus d’affinités avec les arts visuels et la musique, Charlotte, elle, est plus attirée par la littérature et le théâtre.  « Au final, on a  en quelque sorte rassemblé nos deux projets qui étaient très complémentaires », se réjouit Charlotte.

« A l’Harmonium, l’horeca finance l’artistique. On propose chaque mois une exposition différente qui démarre par un vernissage. Il y a aussi des spectacles d’impro, des concerts, du théâtre, des ateliers artistiques, des soirées contes pour adultes… On essaye de varier au maximum les arts ».
« Gamine, je tapais sur l’harmonium de ma grand-mère dans son salon »

Charlotte et Florence ne sont pas joueuses d’harmonium, mais leur mascotte pose fièrement dans un joli coin en face du bar, éclairé par le puits de lumière en provenance de la pièce où a lieu les événements. « J’en ai hérité de ma grand-mère », explique Charlotte. « Je tape dessus depuis que je suis gamine dans son salon! « 

Désormais, l’instrument est restauré et s’exprime grâce à quelques artistes intrépides qui passent par l’Harmonium. « Un jour, un groupe en a joué pour accompagner une chanteuse de blues, c’était vraiment génial et surprenant », se souvient Charlotte, toujours aussi admirative des talents qui passent par ici. « Je ne suis pas claviériste. Faire deux choses différents avec mes deux mains en même temps, c’est très compliqué, ce n’est pas dans mes gènes! »

« On fait tout nous-même ! »

Sur un clavier peut-être, mais dans la vraie vie, c’est autre chose! Depuis l’ouverture de l’Harmonium il y a deux ans, elle et Florence gèrent tout de A à Z. « La cuisine, le ménage, organiser les expos, les événements, le service au bar… On fait tout nous-même ! »Leur motivation impressionne. Les deux amies ont passé le cap de leurs trente ans avec ce sacré bébé sur les bras, mais elles semblent aussi rayonnantes qu’au premier jour (même si elles ont tenté de nous faire croire le contraire).

« Au début, on se disait qu’on voulait être à deux tout le temps mais ce n’était pas possible sur du long terme. Grâce à une organisation un peu alternée aujourd’hui, on arrive à mieux gérer et optimiser notre temps. »

« Désormais, les rendez-vous sont plus clairs et réguliers »

L’Harmonium semble parfaitement accordé. Côté événements, si Charlotte et Florence devaient chercher elles-mêmes des artistes il y a deux ans, aujourd’hui, ce sont eux qui viennent à elles. « C’est vraiment gai, ça fait plaisir. Au début c’était au gré des rencontres », explique Charlotte. « Aujourd’hui, on propose certains rendez-vous réguliers, comme les spectacles d’impro ou encore les soirées contes chaque dernier jeudi du mois, lors des ‘Stories nights’« .

Avec des événements clairs et plus réguliers, des vernissages, des savoureux lunchs à heures fixes, des brunchs le dimanche, l’Harmonium se crée un petit réseau d’habitués.
  
« Grâce aux événements, les gens viennent jusqu’à nous! »

Comme beaucoup, Charlotte et Florence avaient d’abord en tête de s’installer dans les communes de Saint-Gilles ou d’Ixelles.

« A Saint gilles quand tu vas à la commune en disant « bonjour j’ai un projet culturel » ils te répondent « Oui, et bien comme tout le monde! »

Mais elles ne regrettent pas d’avoir atterri à Uccle « en lisière d’Ixelles », précise Charlotte. « Ce quartier est très chouette, c’est assez mélangé.  Il y a autant de familles avec enfants que de personnes très âgées ou de plus jeunes. Selon les moments de la journée ou les types d’activités, on accueille des profils très différents. Ce n’est pas dans l’esprit des gens de venir dans ce quartier s’ils ne connaissent pas. Mais grâce aux événements, les gens viennent jusqu’à nous! »

A Uccle, elles ont aussi trouvé le lieu bien spécifique qu’elles ont cherché pendant de longs mois. « Il nous fallait quelque chose d’assez grand avec un espace à part pour faire des événements des concerts. »
Un espace pour le lunch, un bar, mais aussi et surtout cette formidable ancienne cour recouverte, un lieu spacieux qui a déjà vu vivre de grandes soirées.

La perle rare est donc là: l’Harmonium est un lieu lumineux et tout en longueur, où les ambiances évoluent selon les pièces et les moments de la journée. Une chose ne varie jamais, c’est ce sourire et la joie communicative de Charlotte et Florence. Les deux sacrées gonzesses comptent bien poursuivre leur aventure en régalant qui veut d’événements surprenants et de mets succulents. Est-ce que vous allez passer à côté de ça?

 L’Harmonium
Rue Vanderkindere 293, 1180 Uccle
Ouvert du mercredi au dimanche
Plus d’infos et l’agenda des événements